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NOTE SUR LA LOI ANTI-CORRUPTION DE LA REPUBLIQUE DE GUINEE

La République de Guinée, est  engagée dans une lutte contre les phénomènes de corruption qui affectent négativement son processus de développement économique. La notion de corruption englobe des pratiques très diverses et n’est pas abordée de la même manière dans les textes  juridiques.

Pour matérialiser cette volonté de lutter contre la corruption, le pays a institué par Décret D/2017/219/PRG/SGG, la loi L/2017/041/AN du 04 juillet 2017 portant prévention, détection, et répression de la corruption et des infractions assimilées.

La mise en place de cet instrument juridique, traduit ainsi la volonté des autorités guinéennes à se conformer aux textes juridiques internationaux déjà ratifié notamment :

          -        la Convention des Nations Unies contre la corruption ;

          -        la Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption ;

          -        le Protocole de la CEDEAO sur la lutte contre la corruption.

A ces textes internationaux, s’ajoutent certains textes nationaux notamment :

          -       la Constitution : elle est la norme suprême de l’Etat et réaffirme la volonté du peuple de promouvoir la bonne gouvernance et de lutter résolument contre la corruption. 

        -     la Loi portant Partenariat Public-Privé : accorde plein droit à toute personne victime d’un acte de corruption ou d’une pratique frauduleuse dans le cadre de la passation ou de l’exécution d’un contrat de partenariat public-privé, d’intenter une action contre l’Etat et toute autre personne physique ou morale impliquée ; 

         -     le Code Général des Impôts : ce texte précise que la violation des dispositions relatives à l’interdiction de paiement des Pots-de-vin, sera punie des amendes et emprisonnements prévus au code pénal ; 

        -    le Code des Investissements : interpelle tous les investisseurs de s’abstenir de tout acte de corruption, de concurrence déloyale, et de tout autre acte assimilé pendant ou après son établissement. 

           -     la Loi Anti-blanchiment des Capitaux : cette loi a institué la Cellule Nationale  de Traitement des Informations Financières (CENTIF), institution habilitée d’apporter son concours à l’agence nationale de lutte contre la corruption, à chaque fois qu’elle constate des faits de corruption dans son domaine de compétence ; 

        -   le Code Pénal : met la corruption et les infractions assimilées au rang des infractions imprescriptibles et les réprimande sévèrement. 

     I-     IMPORTANCE DE LA LOI ANTI-CORRUPTION

L’adoption de la loi anti-corruption traduit la volonté du gouvernement de la République de Guinée d’offrir un environnement juridique sain et favorable à l’amélioration du climat des affaires. Elle instaure un climat de transparence et de protection des investisseurs contre les éventuelles corruption ou tentatives de corruption.

Elle permet également aux investisseurs victimes d’un acte de corruption ou d’une infraction assimilée de bénéficier du concours des différents organes impliqués dans la lutte contre la corruption tant sur le plan national qu’international.

La loi accorde la possibilité à toute personne, employée d’un organisme public ou privé, victime ou témoin des pratiques frauduleuses de pouvoir saisir le Procureur de la République ou l’organe national de lutte contre la corruption afin de sanctionner les fraudeurs et leurs complices.

II-      CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI ANTI-CORRUPTION

La nouvelle loi anti-corruption du 04 juillet 2017 régie le cadre juridique et institutionnel de la corruption en Guinée, elle s’applique  aux faits de corruption et aux infractions assimilées imputables à :

      -    toute personne  investie d’une autorité publique à quelque degré que ce soit, d’un mandat public, privé, électif ou d’une délégation de service public, qui concourt à la gestion des biens de l’Etat ou de ses démembrements, des établissements publics, des sociétés d’économie mixte ou des projets et programmes de développement ; 

         -       toute personne physique ou morale du secteur privé investie d’un mandat public, privé, électif ou d’une délégation de pouvoir ;

      -   tout agent public ou privé ressortissant d’un Etat étranger, impliqué dans un quelconque acte de corruption ou infraction assimilée visée par la nouvelle loi anti-corruption.

En plus, cette loi s’applique à chaque fois que les faits de corruption sont commis sur le territoire national, à bord d’un navire ou aéronef  battant pavillon guinéen, à l’étranger à l’encontre d’un ressortissant guinéen, à l’étranger par un ressortissant guinéen ou par une personne apatride résidant habituellement en Guinée, à l’étranger en vue d’un blanchiment sur le territoire national, ou lorsque les faits de corruption sont commis au préjudice de l’Etat guinéen.

Enfin, lorsque l’auteur supposé se retrouve sur le territoire national et que l’Etat guinéen ne l’extrade pas. 

III-       PRÉVENTION DE LA CORRUPTION

Pour prévenir les risques de corruption, la loi a catégorisé les agents publics et interdit le financement de toute activité politique ou syndicale aux démembrements de l’Etat, aux entreprises publiques et aux sociétés d’économie mixte.

Dans le corps des magistrats, l’existence du Conseil Supérieur de la Magistrature est un gage de protection des investisseurs contre les risques de manipulation de l’appareil judiciaire. Cette institution constitutionnelle est compétente pour sanctionner les magistrats accusés des faits de corruption ou infractions assimilées dans l’exercice de leur fonction.

Par ailleurs, les établissements, les entreprises et sociétés privées ont l’obligation de communiquer chaque année à la Cour des Comptes, les paiements qu’ils effectuent au profit de l’Etat, et les services de l’Etat, les versements qu’ils ont reçus de ces derniers.

En matière de comptabilité et d’audit, la loi fait obstacle aux entreprises et sociétés du secteur privé d’établir des comptes hors livres, d’enregistrer des dépenses inexistantes ou d’éléments de passif dont l’objet n’est pas correctement identifié.

Toutefois, elle les oblige à communiquer au Procureur de la République les résultats des audits de contrôle ou de vérification de gestion ou de conformité que révèlent des cas de corruption ou d’infractions assimilées.

Enfin, quant aux lanceurs d’alerte, ils bénéficient d’un statut particulier et d’une protection spéciale de la part de l’Etat contre les actes éventuels de représailles ou d’intimidation, cette protection spéciale s’étend également aux actionnaires, directeurs, secrétaires de société, employés, syndicats enregistrés qui représentent les employés, fournisseurs et employés des fournisseurs et à toute personne qui divulgue des informations objectives et désintéressées.

IV-      CADRE INSTITUTIONNEL DE LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION

En Guinée, la mission de lutte contre la corruption relève de la compétence des organes ci-après :

            1)     L’Agence Nationale de Lutte contre  la Corruption (ANLC)

L’ANLC est une structure rattachée à la Présidence de la République par le Décret D/2012/132/PRG/SGG portant organisation de la Présidence de la République. Elle a pour mission d’élaborer et de suivre la mise en œuvre de la politique nationale de bonne gouvernance et de conduire les activités de prévention, détection et de répression de la corruption et les pratiques assimilées.

Son domaine de compétence couvre l’ensemble des structures et entités publiques ou privées quel que soit le mode de gestion, d’organisation ou de localisation géographique.

Elle peut également se constituer partie civile devant les juridictions nationales, étrangères ou internationales.

Le mode de fonctionnement, les missions, les attributions, la composition et l’organisation de l’ANCL seront déterminés dans un décret pris en conseil des ministres.

           2)     La Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF)

La Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières est un service administratif  placé sous la tutelle du Ministère de l’Economie et des Finances. Sans préjudice de ses missions relatives à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, la CENTIF est chargée pour les cas de corruption d’informer l’organe national de lutte contre la corruption.

En collaboration avec l’Interpol et l’Agence Nationale de Lutte contre la Corruption, la CENTIF  facilite auprès du pouvoir judiciaire l’identification et le rapatriement des avoirs mal acquis et le transfèrement des personnes incriminées.

          3)     L’Organisation Internationale de Police Criminelle (INTERPOL)

Depuis le 4 septembre 1961, la Guinée est membre de l’Organisation  Internationale de Police Criminelle (OIPC ou INTERPOL), une institution de lutte contre les activités criminelles notamment la corruption sur le plan international. Elle localise, arrête et met à la disposition des autorités compétentes, des  personnes faisant l’objet de poursuites pour crime par une autorité judiciaire.

Elle a pour mission de prévenir et combattre la criminalité grâce à une coopération policière internationale renforcée. Elle permet de renforcer la sécurité nationale afin de prévenir les activités criminelles.

En Guinée, l’INTERPOL est représentée par le Bureau Central National d’INTERPOL qui est une division de la Direction Centrale de la Police Judiciaire.

V-     QUELQUES INFRACTIONS ASSIMILÉES A LA CORRUPTION 

           -        la soustraction ou la tentative de soustraction de fonds publics ou privés ; 

           -        la destruction ou la tentative de destruction des actes, des titres ou tout autre objet auxquels les auteurs ont accès en raison de leur fonction ; 

       -    l’utilisation ou la divulgation sans autorisation, même après cessation de leur fonction, des informations confidentielles auxquelles les auteurs avaient accès en raison de cette fonction ; 

           -        l'utilisation de l'autorité conférée par la fonction pour servir abusivement ses intérêts personnels ou ceux d'autrui ; 

           -        la prise ou la réception d'une participation de quelque nature qu'elle soit dans une entreprise publique ou privée dont l'auteur avait, en raison de sa fonction, la surveillance ou le contrôle, pendant un délai de cinq ans à compter de la cessation de celle-ci, sauf lorsque les capitaux sont reçus par dévolution successorale ; 

        -     l'acceptation, de manière directe ou indirecte, d'un cadeau ou de tout autre avantage pouvant mettre le bénéficiaire dans l'obligation morale d'accorder un traitement préférentiel ou spécial.

L’adoption de la loi anti-corruption traduit l’engagement du gouvernement guinéen d’assurer la sécurité juridique et judiciaire dans le monde des affaires et de garantir la transparence dans la gestion publique.


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